Conflit locataire-bailleur: que dit la loi haïtienne sur les loyers?

Généralement, en cas de conflit avec le bailleur, le locataire est parfois tenté de suspendre le paiement de ses loyers. Soit par le fait que le prix des loyers ait été augmenté par le bailleur ; soit pour cause de réclamation de nouveau confort ou encore parce qu’il est troublé dans la jouissance de la maison louée. Mais que dit la loi ?

Par Me Samson BEUCIA

A côté du Code civil haïtien daté de 1825, il existe cinq (5) lois qui traitent de la question des Loyers en Haïti et qui forment la législation sur cette pratique. Cette matière est très importante non seulement pour les professionnels du droit, mais également pour chaque locataire et bailleur. Il faut préciser qu’on entend par bailleur celui qui s’engage à procurer au cocontractant appelé locataire la jouissance d’une chose mobilière ou immobilière, contre une rémunération. Alors que le locataire est celui qui obtient le droit d’utiliser la chose louée contre le versement exigé.

Ce sujet tire sa pertinence dans le fait que la majorité de la population haïtienne se trouve en situation de location d’immeubles alors qu’elle est complètement étrangère aux lois régissant la matière et aux contrats de bail. Le plus récent recensement général de la population haïtienne répondant aux normes internationales en vigueur organisé, remonte au 12 janvier 2003. Ce recensement a indiqué que 58.8% de personnes vivant dans l’aire métropolitaine sont dans les loyers. La demande de location aux fins d’habitation a certainement très largement augmenté suite au séisme du 12 janvier 2010. Le doctrinaire Hans Ludwig Joseph, dans son ouvrage « La garantie du droit au logement en Haïti face à la permanence des risques naturels » a porté que la moitié de la classe moyenne en Haïti est locataire. Une augmentation qui se coïncidait avec l’explosion démographique qui est constatée, en particulier dans les zones urbaines.

Généralement, en cas de conflit avec le bailleur, le locataire est parfois tenté de suspendre le paiement de ses loyers. Soit par le fait que le prix des loyers ait été augmenté par le bailleur ; soit pour cause de réclamation de nouveau confort ou encore parce qu’il est troublé dans la jouissance de la maison louée. Mais que dit la loi ?

La loi du 14 septembre 1947 sur l’interdiction d’augmenter des loyers et celle du 19 juillet 1961 édictant des mesures de protection en faveur des économiquement faibles quant au coût des loyers établissent des sanctions pour toute tentative d’augmentation des loyers et ceci même en cas de changement de locataire. Dans le cas de paiement des loyers augmentés en dehors des conditions prévues par la loi, le locataire peut réclamer l’excédent du prix payé sur les loyers à venir à raison de 25 % à travers une action en indu perçu. Aussi, une action par devant le tribunal correctionnel peut être ouvert contre le propriétaire avec peine allant de 5 jours à trois mois d’emprisonnement et d’une amende de 50 à 1000 gourdes.

Parallèlement, ces lois établissent le barème du coût des loyers en disposant que le coût du plafond des loyers soit estimé à 1% joint d’une diminution de 25% (réf : art 6 loi 19 juillet 1961) de la valeur réelle de l’immeuble et ne doit pas être supérieur à ½ % du coût des loyers annuels. D’ailleurs les loyers doivent être identiques au montant ayant servi à la base de calcul de l’impôt locatif. C’est-à-dire, un immeuble dont l’impôt locatif est payé à 1000 gourdes, doit être nécessairement loué à 12.000 gourdes l’an.

Toutefois, elle protège le propriétaire contre le non-paiement de plus de trois mois de loyers par le locataire en demandant au tribunal de prononcer une exécution provisoire au chef de déguerpissement du locataire.

La loi du 17 mai 1948 est, pour sa part, la référence pour mettre fin à un contrat de location hors des cas de non-paiement. Tout comme le locataire peut intenter une action en Congé de Location, le locataire peut bénéficier d’un délai d’un délai de deux (2) ans à quatre (4) ans pour les maisons résidentielles et de trois (3) à cinq (5) ans pour les maisons commerciales ou industrielles, et le paiement durant cette période doit se faire à la date fixe. Cette décision doit-être prononcée par le tribunal de paix où se situe la maison.

Me Samson BEUCIA