Coronavirus : à Wuhan, confinement et isolement des malades ont permis de vaincre l’épidémie

Dans un hôpital de Wuhan (Chine), le 17 mars 2020. STR / AFP

Si la Chine a tardé à reconnaître la dangerosité de l’épidémie, n’hésitant pas à arrêter des médecins qui tentaient de donner l’alerte fin décembre 2019, ses premières mesures ont été radicales. Le 20 janvier, le président chinois, Xi Jinping, déclarait que la situation était « grave », et l’épidémiologiste de renom Zhong Nanshan expliquait à la télévision nationale que le virus était bien contagieux entre humains. Trois jours plus tard, la veille des vacances du Nouvel An chinois, la ville de Wuhan, la capitale du Hubei, était coupée du monde. Les jours suivants, c’est toute la province qui était mise sous cloche, tandis que la Chine se barricadait progressivement.

Toutes les provinces du pays lancent alors une grande chasse à l’homme pour retrouver les 5 millions de personnes originaires de Wuhan qui ont voyagé à travers la Chine pour le Nouvel An, l’occasion chaque année de la plus grande migration au monde. Dans toute la Chine, ils sont priés de se signaler aux autorités locales qui s’assurent qu’ils ne sortent pas de chez eux pour au moins quatorze jours.

Les outils de l’Etat policier sont mis à contribution : en Chine, il faut donner son numéro de carte d’identité pour acheter un billet de train, d’avion, de car, ou s’enregistrer à l’hôtel, ou encore acheter une carte SIM. La police peut tracer la population efficacement. La psychose fait le reste : des habitants de Wuhan de retour dans leurs villages d’origine ont été enfermés dans une chambre par leur propre famille.

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Partout en Chine, les consignes s’affichent sur des banderoles en caractères blancs sur rouge sur les murs des villes et des campagnes : « Ne sortez pas de chez vous, ne sortez pas de chez vous, ne sortez vraiment pas de chez vous ! » La plupart des villes se barricadent : si elles ne sont pas officiellement en quarantaine, il est très difficile de sortir de son lieu d’origine. Les habitants restent chez eux, se contentant de sortir pour l’essentiel. Les provinces, villes et villages sont fermés aux personnes étrangères. Le pays est paralysé. La plupart des provinces prolongent les vacances de dix jours, jusqu’au 10 février, mais, dans les faits, l’activité reprend très lentement jusqu’à la fin du mois.

Quarantaine durcie dans le Hubei

Ces mesures, généralement bien suivies par une population effrayée par le virus, suffisent dans la plupart du pays. Hors du Hubei, la courbe des infections s’infléchit à partir du 7 février et, dès le 17 février, elle est parfaitement plate. Le pays de 1,4 milliard d’habitants ne déclare quasiment aucun nouveau cas.

Au Hubei, en revanche, l’épidémie fait toujours rage. Le nombre de nouveaux cas ne baisse pas clairement malgré les restrictions. Les services d’urgences sont dépassés. Le premier des deux hôpitaux de campagne construits en dix jours, terminé le 3 février, pouvait accueillir 1 000 patients. Le jour même, la ville annonçait la découverte de presque 3 000 nouveaux cas.

Faute de kits de test et de lits dans les hôpitaux, les patients présentant des symptômes moins graves sont renvoyés chez eux, où ils contaminent leurs proches. Le cas de Chang Kai, un metteur en scène de 55 ans, choque le pays : son père est emporté fin janvier par la maladie, sans même avoir obtenu un lit à l’hôpital. Sa mère décède quelques jours plus tard, et, le 15 février, il est lui-même emporté, laissant sa femme aux prises avec la maladie.

Alors que le système de santé est dépassé, conduisant à un taux de létalité de 4,6 % à Wuhan, contre 0,89 % pour le reste de la Chine, les autorités décident de durcir encore les conditions de la quarantaine dans le Hubei, à partir du 9 février. A cette date, les habitants de la province n’ont le droit de quitter leur domicile qu’une fois tous les quelques jours, puis plus du tout. Les comités de résidents organisent des distributions de vivres.

Des hôtels sont réquisitionnés

Parallèlement, la ville transforme stades, écoles et centres de congrès en une quinzaine de lieux d’isolement pour les malades présentant des symptômes bénins. Des hôtels sont aussi réquisitionnés. Plus question de rester chez soi et de contaminer ses proches. Les comités de résidents rendent aussi visite à tous les habitants pour prendre leur température. Parfois, des habitants sont emmenés de force en isolement. Mais les résultats sont là : à partir de mi-février, on passe de plus de 2 000 infections par jour à quelques centaines, puis quelques dizaines début mars.

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Retournement de l’histoire, la plupart des nouveaux cas sont désormais importés de l’étranger, en majorité par des Chinois de la diaspora ou des étudiants de retour dans leur pays d’origine. Pour éviter une nouvelle vague de contaminations, les autorités ont mis en place des contrôles très stricts aux aéroports, avec quatorzaine obligatoire dans des hôtels réquisitionnés pour l’occasion ou au domicile des personnes.

Les voyageurs arrivant dans les grandes villes chinoises suivent un parcours balisé pour enregistrer leurs informations, avant d’être envoyés en bus jusqu’à leur résidence où les comités de résidents les accompagnent jusqu’à leur domicile, qu’ils ne doivent pas quitter pendant deux semaines, sous peine d’amende ou d’emprisonnement. Preuve que le système fonctionne, beaucoup de voyageurs arrivant d’Europe sont testés positifs à leur descente d’avion.

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