Haïti – ONU : Rapport de l’ECOSOC sur la situation en Haïti…

Du 16 au 19 juillet à New York, s’est tenu le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, organisé organisé par le Groupe consultatif ad hoc du Conseil Économique et Social (ECOSOC) des Nations-Unies, auquel participait le Chancelier haïtien Bocchit Edmond. Vendredi à l’issue de ce Forum l’ECOSOC a rendu public son rapport sur la situation en Haïti et ses recommandations.
Dans son rapport, le Groupe constate qu’Haïti connaît aujourd’hui une crise aux dimensions multiples. Le pays reste en proie à d’importantes tensions économiques et sociales qui, conjuguées aux besoins humanitaires persistants, sont à l’origine de l’instabilité politique et de la détérioration de la sécurité. Ces incertitudes empêchent les pouvoirs publics de répondre aux besoins fondamentaux de la population et compromettent la réalisation du Programme 2030 et des objectifs de développement durable.

Le Groupe presse le Gouvernement, l’opposition et tous les secteurs de la société de s’engager dans un dialogue national constructif et ouvert à tous afin de sortir de l’impasse politique et de fixer un cap pour le développement socioéconomique du pays. Il exhorte également la communauté internationale à continuer de coopérer collectivement avec Haïti afin d’assurer le succès de la transition d’une présence de maintien de la paix à une configuration davantage axée sur le développement, qui soit à même d’apporter durablement au peuple haïtien sécurité, stabilité et développement.
La situation politique en Haïti est particulièrement instable depuis le dernier rapport du Groupe au Conseil économique et social. De grandes manifestations ont eu lieu au second semestre de 2018 et du 7 au 17 février 2019 en signe de protestation contre la forte hausse des prix du carburant due à la suppression des subventions par le Gouvernement et contre la détérioration de la situation socioéconomique. Le détournement présumé, par des agents de l’État, de fonds provenant du programme de prêts PetroCaribe de la République bolivarienne du Venezuela a exacerbé la colère de la population, qui est descendue dans la rue pour demander des comptes au Gouvernement et réclamer de meilleures conditions de vie. Les manifestations initialement pacifiques, en particulier celles de février 2019, sont parfois devenues violentes, des manifestants ayant vandalisé des biens publics et privés, érigé des barrages routiers, utilisé des armes à feu et paralysé les activités économiques dans plusieurs villes du pays. Ces troubles ont entraîné la fermeture d’entreprises, ce qui a eu un effet négatif sur les activités génératrices de revenus, en particulier pour les femmes qui ne pouvaient pas travailler sur les marchés en raison de l’insécurité et limité l’accès de la population aux services et biens essentiels, notamment au carburant, à l’électricité, au gaz domestique, à l’eau et à la nourriture. Plusieurs hôpitaux ont fait face à une pénurie d’eau, d’électricité, de médicaments et de fournitures de base, tandis que les organisations de développement et d’aide humanitaire ont dû temporairement interrompre leurs activités du fait de l’insécurité.

L’exclusion et les inégalités économiques sont les causes profondes de l’impasse politique dans laquelle se trouve actuellement le pays et de la détérioration des conditions de sécurité. Lors de sa visite en Haïti , le Groupe a entendu répéter à de nombreuses reprises que la précarité économique et l’exclusion sociale avaient entraîné une augmentation de la violence. Les conditions économiques difficiles, conjuguées à l’insuffisance des dépenses publiques, y compris pour les programmes sociaux, ne peuvent qu’aggraver la pauvreté et marginaliser davantage les groupes les plus vulnérables de la population, et avoir des répercussions dangereuses sur la sécurité. Dans ce contexte, il est nécessaire de mieux mobiliser les ressources du pays afin de faciliter l’accès aux services sociaux indispensables grâce à des mesures budgétaires audacieuses, et de créer les conditions d’un véritable développement économique, en accordant une attention particulière aux besoins des jeunes.
Pour renforcer la résilience et créer des conditions propices au développement social, les mesures socioéconomiques doivent s’accompagner de véritables progrès concernant l’état de droit et la bonne gouvernance, la mise en place d’institutions solides, la réforme du secteur de la justice, la lutte contre la corruption et la promotion et la protection des droits de la personne.

Le Groupe a entendu à de nombreuses reprises que le manque de confiance envers le Gouvernement et les institutions nationales, répandu dans toutes les couches de la société haïtienne, était au coeur de la crise. Un dialogue national associant toutes les parties, condition préalable à toute avancée sur les fronts politique, social et économique, doit donc être organisé de toute urgence. Le Groupe estime par ailleurs qu’il faudrait s’employer à la fois à satisfaire les besoins fondamentaux de la population et à remédier à la crise humanitaire que connaît le pays, tout en renforçant la capacité de survie des plus pauvres, dans le respect du principe consistant à aider d’abord les plus défavorisés.
Il faut également s’attacher à lutter contre l’insécurité croissante, notamment en adoptant une approche multi-sectorielle de la lutte contre la violence des bandes organisées, qui soit fondée sur des programmes visant à réduire la violence de proximité, sur la gestion des armes et des munitions, sur le renforcement de l’État de droit, sur des mesures politiques et socioéconomiques et sur le renforcement des capacités de la police nationale.
Téléchargez le rapport complet de l’ECOSOC et ses recommandations (PDF) :https://www.haitilibre.com/docs/E_2019_80_F.pdf
En savoir plus sur l’ECOSOC :
Groupe consultatif ad hoc du Conseil Économique et Social (ECOSOC) est l’un des six principaux organes des Nations Unies responsable d’établir des normes et de formuler des recommandations visant à réduire la pauvreté, améliorer la santé et l’éducation, promouvoir le respect des droits de l’homme et protéger l’environnement. Il constitue la structure centrale de coordination des activités économiques et sociales du système des Nations Unies. Il est présidé par le Canada et est composé des représentants permanents de l’Argentine, des Bahamas, du Belize, du Bénin, du Brésil, du Canada, du Chili, de la Colombie, d’El Salvador, de l’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de la France, d’Haïti, du Mexique, du Pérou, de la Trinité-et-Tobago et de l’Uruguay auprès de l’Organisation des Nations Unies.