Les Bahamas considèrent comme « grave ingérence d’Haïti » une déclaration de Karl Henri Chatelier dans un journal de Nassau, le 24 juillet à propos du bidonville Shanty

Le Chargé d’Affaires a.i. de l’Ambassade d’Haïti, François Michel, a été convoqué jeudi à la Chancellerie des Bahamas « pour être sermonné » par Mme Rhoda M. Jackson. Entre-temps, Edmond Bochitt planifie l’envoi à Nassau d’une délégation pour « investigation » et éventuellement présenter des excuses de Port-au-Prince aux autorités de Nassau pour les soit-disant écarts de langage du premier-secrétaire de l’Ambassade d’Haïti aux Bahamas, M. Karl-Henri Du Chtâtelier
Jeudi à moins de 72 heures du 104ème anniversaire du 1er débarquement des marines en Haïti, les autorités des Bahamas ont voulu rappeler à l’ordre les diplomates haitiens accrédités dans l’archipel. Un comportement que les autorités haïtiennes ne manifestent que très rarement à Port-au-Prince depuis Anténor Firmin en 1898 sermonnant l’ambassadeur des Etats-Unis pour arrêter toute ingérence dans les affaires internes d’Haïti. Firmin est mort en septembre 1911, bien avant le débarquement du 28 juillet 1915 qu’il avait d’ailleurs prédit.

Le ministère des Affaires Etrangères des Bahamas a convoqué jeudi dernier le chargé d’affaires a.i. de l’ambassade d’Haïti à son siège « pour traiter des sujets de préoccupation parus à la une du journal The Tribune le mardi 24 juillet 2018, sous le titre : « Embassy Role in Shanty Town Evictions » (Le rôle de l’ambassade dans les expulsions de Shanty Town).

Rhoda M. Jackson, secrétaire permanente par intérim au ministère des Affaires Etrangères des Bahamas, aurait eu un franc pourparlers avec François Michel, le chargé d’affaires par intérim, a révélé un communiqué publié jeudi par cette entité gouvernementale.

Toutefois, Jackson a indiqué, a appris Rezo Nòdwès, que « les déclarations publiques attribuées à Karl Henri Chatelier, Premier secrétaire de l’ambassade d’Haïti, ont soulevé la plus grande inquiétude du gouvernement des Bahamas« , soulignant « en particulier du fait que la position du gouvernement haïtien, évoquée en son nom, donnait au gouvernement des Bahamas un sentiment d’ingérence extérieure dans ses affaires internes« .

Les petits mots de Chatelier à la presse des Bahamas ayant choqué les autorités de l’archipel

Dans une interview accordée à ZNS Morning Edition, M. Chatelier a suggéré les options de rénovation qui amèneraient les résidences des bidonvilles à se conformer aux codes du bâtiment, à la location du terrain et à la prolongation du délai d’expulsion.

« Ils sont prêts à reconstruire les bidonvilles avec leurs propres possibilités« , a déclaré M. Chatelier à ZNS ajoutant qu’ « Ils respecteront toutes les exigences, comme l’électricité, l’eau potable – tout et cela donnera un autre aspect au bidonville Shanty. Et permettra au gouvernement bahamien d’avoir la fin heureuse et quant à eux les bénéficiaires, la joie d’habiter un endroit digne du nom« .

Les Bahamas ne tolèrent pas l’intervention de Chatelier dans la presse locale

Mme Jackson offusquée, à première vue contre les déclarations de M. Chatelier, a souligné « la sensibilité du programme Shanty Town, en particulier dans le cadre de la tentative du gouvernement visant à intégrer toutes les communautés des Bahamas« . Elle a en outre fait remarquer que, « bien que le gouvernement des Bahamas ait toujours travaillé de manière extrêmement étroite avec le gouvernement haïtien, il ne tolérerait pas le type de déclarations rapportées dans le quotidien susmentionné« .

Pour sa part, M. Michel a déclaré que « l’ambassade d’Haïti était pleinement consciente et respectueuse de la souveraineté des Bahamas et a regretté sincèrement l’impression donnée dans l’article que le gouvernement haïtien avait une quelconque ingérence dans les affaires intérieures du gouvernement bahamien« . Il s’est porté garant pour mettre en confiance les dirigeants bahamiens en indiquant que « tout sera mis en œuvre pour que l’incident ne se reproduise plus« .

Une délégation du ministère haitien des Affaires Etrangères arrive lundi à Nassau

Par ailleurs, Edmond Bochitt, ministre démissionnaire des Affaires Etrangères, a décidé d’envoyer lundi une commission d’enquête à Nassau. Le communiqué de la Chancellerie haïtienne indique que « les diplomates haïtiens dont la mission vise à protéger une image positive du pays doivent avoir un comportement irréprochable à l’étranger« . Bocchit, ferait-il lui aussi peu de cas du rapport de la Cour des Comptes, spécifiant que le président Jovenel Moise a fait usage de « stratagème » pour mieux aider l’administration Martelly-Lamothe à « depatcha sou plas » les millions des fonds de Petro Caribe.

Les autorités des Bahamas, jaloux de leur (jeune) souveraineté, vont-elles accepter de faire partie d’une délégation de Caricom qui viendra enquêter en Haïti ou remettre en cause l’audit réalisé par la CSC/CA sur la dilapidation des $4.3 milliards de fonds de Petro Caribe?

cba