Pourquoi devrions-nous aussi être malades lorsque Port-au-Prince est malade ?

Un beau jour, il m’est arrivé de trouver mon petit frère en pleine réflexion. Perdu dans ses pensées, il se grattait la tête, tapotait ses petits pieds sur le sol, l’air angoissé. Je savais que quelque chose n’allait pas, il y avait un truc qui le chiffonnait. J’ai alors décidé de lui demander ce qui le préoccupait autant. Il me sourit bêtement, puis réussit à me sortir cette question : Qui dois-je prendre comme modèle dans ce pays ?

Prise de court, je ne savais pas plus trop quoi lui répondre ; plusieurs secondes se sont écoulées sans que j’aie pu répondre à sa question, dont, pendu à mes lèvres, il guettait la réponse. Que pouvais-je bien répondre à un jeune en quête d’identité ? Quel genre de modèle positif dans la société puis-je lui donner en exemple ? Politiciens, avocats, hommes d’affaires, comédiens, difficile à dire…

Finalement je lui ai demandé ce qu’il cherchait à travers ce modèle qu’il voudrait s’attribuer. Mais j’allais comprendre le mobile de son inquiétude quand il m’a dit : pourquoi devrions-nous aussi être malade lorsque Port-au-Prince est malade ? Il avait complètement raison, nous sommes toujours là, à attendre que Port-au-Prince bouge pour bouger à son rythme. La capitale d’Haïti, est-elle un modèle pour les autres villes du pays ? Si elle l’a été par le passé, ce n’est plus le cas aujourd’hui. A considérer la situation de cette ville, nous ne pouvons que constater l’état lamentable dans lequel elle est plongée actuellement. Elle offre une image indigne d’une capitale qui devrait pourtant être remarquable à tous les points de vue.

Je suis restée muette face à toutes ces interrogations venant d’un jeune de son âge. À dire vrai, je ne savais vraiment pas quoi lui dire. J’ai d’abord pensé à un modèle de réussite dans la famille, un oncle qui gère sa propre firme de construction mais qui parallèlement fait des œuvres caritatives dans sa communauté. Puis je me suis dit que je pourrais aller aussi loin que lui proposer l’homme le plus influent de la ville des Cayes, ou mieux, les millionnaires qu’il voit souvent dans les émissions de télé, les grands chercheurs, les grands inventeurs et techniciens qui réalisent des choses impensables… que pouvais-je bien lui apprendre de plus que ce qu’il sait déjà ?

Sachant qu’il attendait sa réponse, je l’ai rejoint pour lui dire : Vois-tu, nous avons des modèles dont nous pouvons nous inspirer même si on n’en a pas toujours conscience ; parfois nous cherchons vainement l’espoir dans les beaux discours, ou dans les actions humanitaires qui pourraient changer notre conception de la vie. Moi ce que je te dis aujourd’hui c’est que le vrai modèle que tu dois suivre c’est toi-même, il faut arrêter de regarder ou de compter sur les autres pour bâtir quelque chose dont tu pourrais être fier.

Pour réussir le modèle à suivre c’est nous-mêmes, et ceci dans les moindres petits détails de la vie. Chacun a une contribution personnelle à apporter pour atteindre ces idéaux de modèles positifs tant recherchés. Sois d’abord un modèle pour toi-même avant de l’être pour les autres.