Drame à Fermathe : une chaîne d’irresponsabilités méritant des sanctions sévères
DRAME À L’ORPHELINAT « EGLISE DE LA COMPRÉHENSION DE LA BIBLE » DE FERMATHE 55. UNE CHAINE D’IRRESPONSABILITÉS QUI MÉRITENT D’ÊTRE SANCTIONNÉES
Mardi 18 février 2020 ((rezonodwes.com))– Nous, citoyens et citoyennes engagés dans la Promotion et la Défense des droits de la Personne, membres du mouvement « Partenaires pour la Citoyenneté Engagée en Haïti » (PCEH), avions accueilli avec un sentiment de révolte et de dégoût la triste nouvelle du décès de 15 enfants, dont 2 morts carbonisés et les autres suffoqués, dans l’incendie survenue à l’Orphelinat «Eglise de la Compréhension de la Bible » à Fermathe 55, dans la nuit du 13 février 2019. Les deux enfants carbonisés vivaient avec un handicap : Un était un handicapé moteur et le second vivait avec une déficience intellectuelle.
Malgré
les chiffres publiés, nous avons des doutes quant au nombre exact
d’enfants qui auraient péri dans cette tragédie, car L’Institut
du Bien-Etre Social et de Recherche (l’IBESR), institution de
supervision des orphelinats dans le pays, n’a encore rendu publique
aucune information à ce sujet. Combien d’enfants se trouvaient à
l’orphelinat ? Combien ont été secourus ? Où se
trouvent-ils exactement ? Ces informations ne sont pas encore
disponibles.
Les
rumeurs font état de chiffres différents sur le nombre d’enfants
qui se trouvaient dans l’orphelinat et les informations sur ce qui
est advenu des enfants dont les corps n’ont pas été retrouvés ne
sont pas du tout claires.
Nous
citoyens, citoyennes engagées pour la promotion et la défense des
droits de la personne en Haïti, réclamons une investigation
sérieuse et rapide pour savoir où sont passés les enfants qui se
trouvaient à l’Orphelinat « Eglise de la Compréhension de
la Bible » et dont les corps n’ont pas été retrouvés.
Nous
exigeons des autorités la fourniture rapide de moyens pour une
prise en charge des enfants qui sont encore à l’hôpital, ceux et
celles qui se trouvent au centre de transit de l’IBESR,
l’organisation de funérailles dignes pour ceux et celles qui ont
péri et des moyens de réinsertion des survivants dans leurs
familles biologiques ou dans des familles d’accueil.
Nous
profitons de la circonstance pour rappeler un principe fondamental
des Droits Humains qui est celui de la RESPONSABILITÉ,
tant de l’Etat que de la société civile. Cette tragédie
survenue dans cet orphelinat met en évidence toute une chaine
d’irresponsabilités que nous dénonçons et mettons en évidence
dans cette note.
1)
Irresponsabilité de L’Institut du
Bien-Etre Social et de Recherche (IBESR).
Cette institution publique attachée au Ministère des Affaires
Sociales a le mandat de contrôler dans quelles conditions
fonctionnent les centres d’hébergement d’enfants. Comment
comprendre que cet orphelinat ait pu continuer à fonctionner au vu
et au su de tout le monde jusqu’à ouvrir un second centre à
Thomassin 32, alors que depuis 2017, une évaluation et
documentation réalisée avait donné un avis défavorable le
concernant. Qu’est-ce que l’IBERS avait fait pour prévenir une
telle catastrophe ?
2)
Irresponsabilité
de l’Orphelinat en tant
qu’institution. En choisissant de
prendre sous leur garde des enfants, les responsables de
l’Orphelinat, qu’ils aient eu ou non la reconnaissance de l’Etat,
ont l’obligation morale de prendre soin de ces mineurs, de les
protéger, d’avoir un minimum de moyens disponibles pour cette
prise en charge et une équipe suffisante et entrainée. Cet
horrible incident dans l’orphelinat a tout l’air d’une grande
négligence. Les dirigeants de cette institution ainsi que tout le
personnel ont une grande responsabilité dans ce qui s’est passé
et doivent rendre compte par-devant la justice de leur négligence
3)
L’irresponsabilité du personnel de service, le soir de la
tragédie. Il y a eu quelqu’un qui a
pris la responsabilité d’allumer la bougie et de la placer quelque
part sans se soucier des risques. Il devrait y avoir des gens de
service ce soir-là pour la garde des enfants. La personne qui a
allumé la bougie ainsi que celles qui se trouvaient sur les lieux
sont tout aussi responsables de ce qui s’est passé. Elles
doivent être recherchées et poursuivies correctement pour
négligence grave.
4)
Irresponsabilité de l’Etat face à son obligation de garantir les
droits des enfants. Certains des
enfants qui se trouvaient à l’orphelinat ont des parents. Mais
ces derniers, en raison de leur pauvreté extrême, ne pouvaient pas
prendre soin de leurs progénitures. La mort de ces mineurs vient
nous rappeler l’obligation de l’Etat de prendre les mesures
nécessaires pour que tous les enfants aient un minimum de sécurité
sociale, qu’ils trouvent à manger quotidiennement, qu’ils aient
accès à l’éducation, à un lieu décent pour être logés, etc.
L’article 3 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant,
ratifiée par l’Etat Haïtien en décembre 1994 stipule :
« Les
Etats parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et
les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et
des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes
légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toute
les mesures législatives et administratives appropriées »
(Article 3, alinéa 2).
Les
Etats parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions,
services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent
leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités
compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et
de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de
leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié »,
(Article 3, alinéa 3).
En
droits humains, le principe de la RESPONSABILITÉ
exige que chaque personne accomplisse les tâches qui lui incombent,
respecte son mandat et assume les conséquences de toute négligence
ou non-accomplissement de ses responsabilités. En vertu de ce
principe, nous, citoyens et citoyennes engagés, exigeons les
sanctions appropriées contre: les responsables de l’IBESR qui
n’ont pas fait leur travail, les responsables de l’orphelinat et
les employés qui se trouvaient de service à l’orphelinat le soir
de la tragédie.
Nous
présentons nos sincères condoléances aux parents de ces enfants et
réclament pour eux de la part des organisations d’assistance
légale un accompagnement juridique afin que justice soit faite pour
les victimes.
Fait
à Port-au-Prince, le 18 février 2020.
Ont
signé cette note, les personnes suivantes, coaches et
éducatrices en Droits Humains, membres du mouvement « Partenaires
pour la Citoyenneté Engagée en Haïti (PCEH) » et membres de
plusieurs organisations de droits humains :
Colette
LESPINASSE, PORT-AU-PRINCE
Jocelyne
COLAS, PORT-AU-PRINCE
Mitchell
Scipion ADOLPHE, PORT-AU-PRINCE
Vitaléme
ACCÉUS, (CASODI, CROIX-DES-BOUQUETS)
Michelet
OBEISSANT (LAKOU TIMOUN)
Jetho PIERRE-PAUL (RESEDH/RNDDH)
Saint-Pierre
BEAUBRUN, PORT-AU-PRINCE
Pascal
METELLUS
Jean
Joseph Alfred GIBBS
Vilès
ALIZAR
Benadieu AUGUSTIN
Vana
CHARLES JEAN, SUD-EST
Wilda
PYRAM (FLORE DES FEMMES, CAYES JACMEL)
Cenise
ACINTHE (GARR/THOMASSIQUE)
Ilrick
MARCELIN (CFEDEC, LA VICTOIRE)
Marie
Isnise ROMELUS, JACMEL
Louna
FRANCOIS, PORT-AU-PRINCE
Patrick
Saintil(KODESS, JACMEL
Edex
Paul (CFEDEC, LA VICTOIRE)