29 Mars 1987 – Le Mandat Présidentiel

En Haïti, un président ne perd jamais une élection, car selon l’article 134 de la constitution de 1987, il n’est pas éligible pour se présenter aux joutes présidentielles en tant que président, mais en tant qu’ancien président après cinq ans d’intervalles entre son premier mandat et le nouveau mandat qu’il veut briguer. C’est à cause de cet intervalle que l’ancien président M. Martelly est si populaire.En 2017, si ce principe n’existait pas, soit qu’il aurait gagné les élections cette année-là ou le peuple se serait défait de lui une fois pour toutes. Dans les deux cas, il ne serait pas en train de voler tant de têtes d’affiches.

Dimanche 1er mars 2020 ((rezonodwes.com))– Haïti est le seul pays au monde qui empêche un président de briguer deux mandats consécutifs. Le système établi un intervalle de cinq ans entre ses deux mandats. Le président passe cinq ans au pouvoir, organise des élections à travers lesquelles il passe la torche à un dauphin pour retourner après cinq ans. On l’a vu entre Aristide et Préval qui ont tenu le pouvoir pour 20 ans. On le voit maintenant entre Martelly et Jovenel qui travaillent aussi pour transférer le pouvoir à leurs partisans.

Notons notamment que l’alinéa 3 de ce même article n’empêche pas que les mêmes partis participent consécutivement aux élections présidentielles. Cet intervalle de cinq ans est l’une des sources de corruption et de fraudes électorales. Les présidents restent en mode de campagne durant leur premier mandat; question de préparer le terrain pour leur dauphin. Pendant leur cinq ans d’attente, ils restent relevant sur le terrain à travers des prises de positions sur des sujets brûlant. Dirait-on qu’ils sont plus impliqués dans les affaires de la vie nationale qu’ils l’étaient lorsqu’ils étaient présidents. Durant leur tenure, ils nomment des individus pour les postes les plus importants du pays pour s’assurer que leurs intérêts restent protégés même après leur départ de la présidence.

En fait, ils truquent les élections pour faciliter la victoire de leur dauphin et leur dauphin truquent les élections pour leur faciliter leur nouvelle victoire et ainsi de suite. N’était-ce pas un détail de procédure administrative qui a voulu que seul le président d’un parti inscrive en personne ses candidats, Lavalas garderait le pouvoir pour 100 prochaines années, car M. Préval, au lieu de créer son propre parti politique, aurait créé un autre candidat pour le parti Lavalas. M. Aristide n’était pas en Haïti pour les élections de 2011, ce qui a expliqué l’absence de son parti à ces présidentielles.

Cet intervalle impacte négativement la politesse démocratique et l’alternance politique, car un parti est garanti d’avoir un président pour au moins dix ans comparativement aux autres pays démocratiques où un candidat est testé dans les élections en moyenne chaque quatre ans. En Haïti, les candidats à la présidence sont plus forts que les candidats locaux, car généralement, les Haïtiens votent le symbole bien publicisé par le candidat à la présidence sans qu’ils ne connaissent qui ils votent. En 1991, ce n’était pas que les élus locaux étaient populaires ou dignes d’être candidats, c’était plutôt le fait qu’Aristide était puissant. Par manque d’éducation, les Haïtiens ont voté pour le coq, indépendamment de qui était candidat pour leur collectivité. Ses fanatiques l’ont suivi lorsqu’il a créé son parti Lavalas. Le même phénomène a reproduit en 2011 avec la couleur rose. Raison pour laquelle on a abouti à tant de piètres élus au parlement et aux têtes des communes.

Le système ne prévoit pas l’intervalle de cinq ans ou la limite du mandat présidentiel pour faciliter la corruption, mais pour permettre à un président de retourner dans les communautés pour s’auto évaluer et entendre à nouveau le peuple s’il veut se porter candidat à nouveau. Toutefois, les hommes au pouvoir l’ont utilisé comme un outil de manipulation et de continuité électorales pour conserver leur pouvoir.

Puisqu’il est source de manipulation, de violence et de fraude électorales, l’article 134 mérite d’être amendé, soit pour annuler l’intervalle, restreindre le mandat présidentiel à un seul terme ou permettre à un président de se présenter comme candidat autant de fois qu’il le désire ou autant de fois que le peuple veut lui voter comme il l’en est pour les autres postes électifs dont les mandats sont prévus par les articles 63, 68, 92, et 78 de la constitution.

Bobb RJJF Rousseau, PhD
Public Policy and Administration
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